Interview d'Hubert Brebion, fondateur des studios HBS
Quick-Studio a eu le plaisir d'être reçue par Hubert Brebion, le père des studios HBS, dans l'une de ses premières salles de répétition située rue des Petites-Ecuries (10e arrondissement de Paris). Dans cette interview, Hubert se livre sur son parcours personnel ainsi que sur les différentes facettes de son métier de gérant. Rencontre avec l'un des pionniers de la répétition musicale parisienne.
Hubert Brebion, gérant et fondateur des studios HBS
Bonjour Hubert. Tu es le gérant et fondateur des studio HBS qui comptent parmi les premiers studios de répétition de Paris. Peux tu nous retracer leur histoire en quelques dates-clés ?
J'ai ouvert un premier studio en 1983 rue du Faubourg Saint-Denis (10e arrondissement de Paris). Le succès a rapidement été au rendez-vous et il a fallu déménager dans un autre endroit plus grand. C'est de cette façon qu'on est arrivé rue des Petites-Écuries en 1987 où l'on a ouvert 7 salles. Ça marchait bien, et on a décidé en 2009 d'ouvrir un deuxième studio dans le 19e arrondissement, le studio Géode, qui compte actuellement 9 salles, et potentiellement 13.
Et qu'est-ce qui t'a poussé à te lancer dans cette aventure de création de studio ?
Un ami avec qui je jouais (Hubert était batteur à l'origine) et qui était bassiste pour le groupe Taxi Girl m'avait proposé d'aménager un studio dans une petite maison à Bagnolet pour notre utilisation personnelle. Mais au final, le local était plus utilisé par nos amis musiciens que par nous. C'est là que j'ai compris qu'il y avait un énorme besoin de lieux de répétition et que l'idée de créer mon propre studio a germé. De fil en aiguille et le succès aidant, j'ai petit à petit dû délaisser la batterie pour me consacrer au métier de gérant de studio (rires).
As-tu une philosophie particulière dans ta manière d'être gérant qui te distinguerait des autres studios ?
J'ai cherché avant tout à proposer des prix assez bas. J'ai vite compris que c'était difficile pour les musiciens de vivre de leur musique et de trouver des endroits corrects et pas trop chers pour répéter. On ne vise pas le haut de gamme, mais plus un milieu de gamme avec un matériel bien entretenu et des studios soignés. J'aime que ce soit propre et bien aménagé. Et nous prenons plaisir à faire les choses nous-même, notamment quand il y a quelque chose à réparer ou à améliorer.
Justement, tes salles ont-elles des caractéristiques particulières ?
Je travaille beaucoup avec mon frère Michel bricoleur inventif et musicien. Donc les caractéristiques de nos salles vont être liées à nos propres goûts . On travaille sur le son qu'on ne veut pas trop mat. On essaye de trouver un son que le musicien va rencontrer dans son parcours. Quand il va jouer dans un bar ou dans une salle de spectacle, il va être confronté à des acoustiques assez éloignées de celles des studios d'enregistrement qui sont idéales. Etant nous-mêmes musiciens, on joue dans nos salles, et si le son ne nous convient pas complètement, on fait ce qu'il faut pour le corriger.
A quels styles de musique appartiennent les musiciens qui viennent dans tes salles ?
Cela dépend des vagues musicales. Quand on a ouvert en 80, on était en plein dans la vague punk. On a tout de suite été confronté au problème de la casse parce qu'ils jouaient très fort. Il descendaient tous les HP (rires). On a donc beaucoup travaillé sur des systèmes de protection, de bridage de puissance. Ensuite il y a eu une grosse vague reggae. Là on rencontrait plus des problèmes d'isolation phonique. En effet , les groupes reggae jouent fort des basses très graves, et le son peut traverser des murs de 50 cm. Les vagues musicales se sont succédées et nous ont permis de travailler avec tous les styles de musique. On apprécie ce mélange. Ne travailler qu'avec des musiciens issus d'un même style musical peut être rébarbatif. Moi je préfère alterner : un groupe de reggae, de jazz, de salsa... J'aime bien rencontrer des gens différents. J'ai moi-même une culture très éclectique. J'écoute beaucoup de styles de musique différents. Certains studios sont centrés sur un style, mais ici ce n'est pas ce que nous recherchons.
Quels conseils donnerais-tu à un jeune groupe qui débute pour bien répéter en studio ?
Pour un jeune groupe, ce qui va être important de comprendre au début, c'est la balance des niveaux. La balance, c'est gérer l'équilibre sonore entre tous les instruments. Quand on commence un instrument, on a tendance à jouer très fort et à se mettre en avant. La balance, on en parle en général pour la scène, mais pas pour la répétition. Un autre conseil pour un jeune groupe, serait de bosser chacun sa partition chez soi avant la répétition. En effet, une répétition est plutôt faite pour travailler la mise en place et la cohérence de l'ensemble du groupe, pas pour faire son travail personnel qui doit être fait en amont. Si un musicien en profite pour bosser ses propres parties, cela fait perdre du temps à tout le groupe. Cette rigueur fait souvent défaut aux jeunes groupes. Il est important de se fixer un but pour la répétition et de discuter de ce qu'il faut faire et ne pas faire.
Cela fait presque 40 ans que ce studio existe. J'imagine que tu dois avoir beaucoup d'anecdotes raconter. Peux-tu nous en livrer une qui t'a particulièrement marqué ?
Il y a beaucoup de bons moments. On a eu par exemple Mory Kanté à l'époque où il a fait son tube international Yéké yéké. Sa maison de disque avait loué le studio pendant une semaine, Mory Kanté se pointait à 14 heures, il s'allongeait dans cette salle-là par terre en attendant les musiciens qui arrivaient un par un et la formation s'enrichissait au fur et à mesure ! Pour moi cela reste des bons moments parce-que c'étaient des musiciens que j'admirais. Ça fait toujours plaisir de collaborer avec des artistes professionnels, même si les groupes amateurs représentent 95% de notre clientèle.
Il y a beaucoup de bons moments, mais j'imagine qu'il doit y avoir aussi des contraintes quand on est gérant de studio. Lesquelles sont les plus difficiles à appréhender ?
Un gérant de studio va avoir à traiter une multitude de petits problèmes au quotidien. Mieux il va assumer ces tâches différentes lui même, mieux il va s'en sortir. C'est pourquoi, concernant l'équipement, la sélection du matériel dans les studios est importante. Il faut savoir choisir du matériel fiable et adapté aux exigences des musiciens. Il faut que le matériel convienne aussi bien à un groupe de jazz qu'à un groupe de métal. Ce choix est donc assez difficile. Ensuite, on va être amené à gérer la casse, une serrure qui pète, une entrée de jack qui lâche, mais aussi tous les câblages qu'il faut entretenir. Si pour chaque problème il faut faire venir un professionnel, ça peut vite devenir très coûteux. C'est pour cela que nous choisissons du matériel de qualité que nous pourrons entretenir nous même.
Tu disais qu'une des facettes du métier était de choisir un bon matériel qui convient à tous. As- tu des instruments de référence ?
Au niveau des batteries, c'est Pearl, car c'est l'un des seuls constructeurs qui pense au service après-vente. Leur système de serrage est pensé pour être réparable. Concernant les claviers, c'est Yamaha pour la fiabilité et la tenue de leur matériel dans le temps. Et pour les amplis guitare, les grandes marques comme Fender et Marshall proposent différentes gammes adaptées à tous les budgets.
Concernant l'avenir des studios HBS, des évolutions sont-elles prévues ?
Dans les deux ans à venir, on va travailler sur l'aspect esthétique des studios ainsi que sur l'amélioration constante du matériel, mais plus dans un esprit vintage. Souvent, le matériel récent est pensé pour une utilisation personnelle et est mal adapté pour une utilisation en studios de répétition. On passe donc pas mal de temps à rechercher du matériel des années 80-90, qu'on trouve plus robuste et avec ce grain vintage qui correspond à l'identité de nos studios.